Rébus de rebuts
Il s'agit d'abord de rebuts, de la ferraille que nous a laissée
la paysannerie, civilisation on ne peut plus industrieuse
et mécanique.
On notera qu'en nos temps où la modernité se décrète
comme mode de consommation, et se décline le plus souvent
comme valeur invalide, on met au rebut non ce qui est inutile
ou inutilisable, mais ce qui ne fait pas profit et ne peut donc
être proclamé moderne. Sereinement, presque benoîtement,
l'artiste avance à contre-pied, et au moins une main dans
le passé. Aussi, peut-on exister comme non-né?
Dans les traces qu'il récupère, il sait voir le tremblement
des vies perdues, les savoirs oubliés, la ténacité de la
vaillance humaine. Il les prend en charge, s'en fait l'artisan, forgeron d'outils de sens, tisserand d'allégories.
Tant tout objet humain, tout fragment même, résonne de
l'humanité entière.
D'aucuns y verront peut-être agencement habile, voué à la
décoration. Somme toute, c'est ce qu'on enjoint aux artistes.
Ce ne serait pas voir d'abord que c'est inhabile, pour
brasser le travail que nous a légué le passé laborieux ;
ensuite que les objets ainsi conçus sont mus par leur valeur
d'usage, et que c'est l'usage des hommes, jusque dans leur
usure, qui est la question permanente d'Olivier Ott.
Jean-Yves Rideau, 9 février 2010